samedi 8 octobre 2016

Choisir un camp

Je voulais voir Les anarchistes au cinéma, mais je l'avais manqué. Finalement, c'est grâce à l'initiative cinéphile inattendue d'un collectif de psychologues et dans l'auditorium d'un musée d'art contemporain que je l'ai "rattrapé". Ce beau petit film français gagne à être connu. Parfois, je nous trouve durs avec les jeunes réalisateurs, en France...

Les anarchistes est le second long-métrage d'Elie Wajeman, 36 ans. Son titre est assez trompeur, en fait: loin de nous offrir un récit historique sur le mouvement libertaire du 19ème siècle, le réalisateur semble d'abord nous entraîner dans un thriller sur fond d'infiltration policière. Jeune flic, Jean Albertini, à peine embauché, est chargé d'intégrer un groupe de jeunes anars, pour faire un compte-rendu régulier de leurs activités et les faire arrêter avant qu'ils commettent un acte violent. Nous sommes dans le Paris de 1899, quelques années seulement après l'assassinat du président Sadi Carnot et les heures sombres où, déjà, de jeunes idéalistes faisaient exploser des bombes dans Paris. Surprise: ce n'est presque pas le sujet du film ! En prenant rapidement des chemins de traverse, le récit nous embarque plutôt vers la découverte d'un groupe exalté, certes, mais pas criminel. Parce qu'ils squattent l'appartement de grands bourgeois, les jeunes rassemblés ici hésitent: vaut-il mieux risquer sa vie ou bien essayer d'en profiter pleinement ? Et le flic infiltré semble hésiter avec eux...

Il est bien évident que ce qui nous est montré n'est pas parfait. Quelques longueurs ou redites font que le rythme du film lui-même n'est pas très soutenu. Le voile bleuté qui flotte sur les images impose également l'idée d'un cocon ouaté, coupé alors de la brutalité de la réalité, tout en conservant un peu de froideur. Vous me direz peut-être que je me trompe, mais je ne les crois pas si nombreuses aujourd'hui les oeuvres qui abordent ainsi des thématiques sociales. Les anarchistes est un méli-mélo, en fait, qui dilue son discours d'évidence politique dans un entre-deux romantique, caractéristique d'une certaine jeunesse. J'ai du coup fini par me poser des questions intéressantes sur ma volonté d'adhésion aux personnages, un peu comme si j'étais devenu celui qui porte un masque pour les duper. Comme j'imagine que c'était le but du scénario, je le trouve réussi. Compliments sincères à la jeune garde d'acteurs français impliqués dans cette histoire: aux côtés d'Adèle Exarchopoulos et Tahar Rahim en duo vedette, il m'a plu de voir Swann Arlaud, Guillaume Gouix, Karim Leklou ou Sarah Le Picard. Eux aussi... gagnent à être connus !

Les anarchistes
Film français d'Elie Wajeman (2015)

Ses deux films ont été présentés à Cannes, mais le cinéaste voit encore le succès public lui échapper. Il a pourtant bien des choses intéressantes à dire et une ambition de cinéma tout à fait louable. Reste, peut-être, à passer un cap. Moi, j'ai été content de découvrir le film du jour peu de temps après Nocturama, une autre illustration de l'envie de révolte incertaine d'une génération de jeunes Français...

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Je ne sais pas si je vous ai convaincus...

Vous remarquerez d'ailleurs que Pascale est d'un avis bien différent.

4 commentaires:

Véronique Hottat a dit…

Film vu suite à l'initiative cinéphile inattendue d'un collectif de psychologues et dans l'auditorium d'un musée d'art contemporain... voilà qui m'intrigue, peut-être même plus que le film ! Et bien je note ce film, sans savoir vraiment si je vais l'aimer ou non, mais je vais tenter l'aventure comme on dit :)

Martin a dit…

Bon, un p'tit bonus, pour ta peine: si tu reviens ici lundi, tu en sauras (un peu) plus. Chut !

Véronique Hottat a dit…

Patience donc ;-)

Martin a dit…

Ta patience n'est pas requise, chère amie, mais disons qu'elle est vivement recommandée !