mardi 8 octobre 2013

Un pêcheur impénitent

Il paraît - mais je n'ai pas vraiment vérifié - que Poisson d'avril serait la première rencontre cinématographique de l'incroyable duo Bourvil / Louis de Funès. Précision de taille: le premier tient le rôle principal du film, tandis que son acolyte doit avoir un petit quart d'heure pour jouer son personnage de garde-champêtre sadique. L'histoire qui les rassemble est toute simple: Émile, modeste employé dans un garage de banlieue, raconte un dimanche à sa femme qu'il est obligé de faire un dépannage... alors qu'en réalité, il part à la pêche.

Évidemment, à l'heure des portables et des statuts Facebook renouvelés vingt fois par jour, cette comédie fleure bon la naphtaline et son décor la France de (Grand) Papa. Il est permis d'en rire ! Objectivement, les acteurs sont bons et ce qu'ils ont à interpréter plutôt croquignolet ! Merci qui ? Merci Michel Audiard, qui signe ici quelques dialogues franchement savoureux. Poisson d'avril compte son lot de scènes mémorables, notamment quand il s'agit pour Bourvil d'acheter une canne à pêche dernier cri à un Maurice Biraud particulièrement bavard ou de relever la taille d'un brochet trop petit d'un centimètre pour être sorti de l'eau. Il me faut vous dire également que les activités aquatiques ne sont qu'un des éléments farfelus du film. Le reste, c'est vaudeville et soupçons d'adultère...

Il ne faut évidemment pas prendre tout cela au sérieux. Soixante ans auront bientôt passé depuis et, bien entendu, ça se sent. Que dire alors d'un personnage féminin qui déclare que son rêve est de vivre au milieu des machines à laver ? Qu'il est joué par une Annie Cordy toute jeunette, par exemple, et à ce titre d'un comique certain. Poisson d'avril ne se déguste avec plaisir qu'en plongeant tête baissée dans la France de l'époque, ce pays "lointain" qui comptait encore en anciens francs. Sans faire preuve d'irrévérence, je relève également que le long-métrage s'autorise à lancer quelques piques aux sommités de son temps et au général De Gaulle, entre autres. Notons aussi que ce bon petit film est le 25ème extrait de la carrière de son auteur. Le symbole de ces années où l'on tournait beaucoup.

Poisson d'avril
Film français de Gilles Grangier (1954)

Ceux d'entre vous qui penseront ou diront que le réalisateur a fait mieux n'auront pas forcément tort.  Il y a ainsi, dans ma famille maternelle, de grands amateurs du cultissime Les vieux de la vieille. Avant peut-être que j'évoque d'autres de ses films, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que Gilles Grangier savait et aimait faire rire, certes, mais qu'il n'a pas tourné que des comédies. Gas-oil offre un bon exemple de son talent de cinéaste dans un tout autre registre.

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